[Récit] Fin..?

I - DESESPOIR

Le vide s'étendait en dessous d'elle. Oppressant. Effrayant. Elle le sentait l'attirer vers lui avec une force irrésistible. Elle se savait glisser doucement vers le sol, froid, dur, qui l'attendait quelques dizaines de mètres plus bas. Agrippée à la rambarde, elle ne pouvait en détacher son regard. Tout en bas, la mort la contemplait. Elle contemplait la mort. C'était son destin, elle allait finir ainsi. Inéluctable. Ses muscles, tétanisés, commençaient à céder peu à peu. Elle tenait dans cette position depuis plusieurs minutes, et était maintenant à bout de force. Ses blessures s'étaient rouvertes et la brûlaient atrocement, de longues traînées rougeâtres se répandant sous les bandages qui la recouvraient presque intégralement, déjà souillés par la crasse et le sang séché.

Elle repensa à son combat contre Reena et Radjie. Combat? Non, ça n'avait pas été un combat, juste une raclée. Elle avait été sotte. Elle s'en était prise à bien plus forte qu'elle, bien plus qu'elle ne le serait jamais. Sotte. Aveuglée par la rage. Elle ne referait plus cette erreur. Assommée sous les coups, elle avait été conduite ici lors de son inconscience. Au canton des Gladiums. Gladium... Le mot résonna longuement dans son esprit. A à peine 3 ans,expulsée du Fahrar, elle était déjà Gladium. Une bonne à rien. Une loque. Une ratée. Evoth avait raison, elle n'était pas digne des Légions. Elle se remémora tous les visages qu'elle avait croisé à la Centurie. Des inconnus, juste des inconnus... Parmi tous ces inconnus, un seul avait eu de la compassion pour elle. Tyr. Elle ne comprenait pas. Pourquoi ne s'était-il pas comporté comme les autres? Pourquoi ne l'avait-il pas méprisée, dédaignée, considérée comme la faible qu'elle était? Bah, cela n'avait plus d'importance désormais. Au moins mourrait-elle appréciée d'une personne, c'est ce qui comptait.

Le vide s'étendait en dessous d'elle. Accueillant. Réconfortant. Tout en bas, la mort lui souriait. Elle lui rendit son sourire, quelques larmes glissant sur ses joues. Elle remercia Tyr en son for intérieur, ferma les yeux, et se pencha en avant.

II - NOUVEL ESPOIR

Elle attendit l'impact, les yeux clos, mais celui-ci ne vint pas. Elle ouvrit les yeux. Le vide s'étendait au dessous d'elle, le sol était toujours aussi loin, mais la mort n'était plus là. Dans son dos, une voix grave retentit :
- C'est dangereux ce que tu fait petite, tu pourrait tomber.
Elle regarda par dessus son épaule avec surprise. Là, se tenait un charr. Sa fourrure était d'un noir plus sombre que la nuit, et ses yeux jaunes brillaient de malice. Un long sourire ironique étirait ses lèvres. Il était vêtu d'une simple tenue de cuir, et des dagues pendaient à ses côtés. Une de ses pattes tenait fermement le gilet de la petite charr, la maintenant ainsi dans les airs.
- Revient de ce côté veux-tu? Tu va finir par t'écraser en bas.
Il la hissa alors, la fit passer par dessus la balustrade et la posa sur le sol ferme. Il la détailla. Comme chaque charr dans cette cité, il était bien plus grand qu'elle. Il reprit la parole :
- Il va falloir un peu que tu m'explique les raisons poussant une charrton de ton âge à un tel geste. Suis mois, je connais un endroit tranquille pour papoter, où il sent meilleur qu'ici.

Ils parlèrent. Longtemps. La nuit défila, et le soleil pointait à l'horizon, annonçant le début d'une nouvelle journée à la Citadelle Noire. Personne ne pourrait déclarer avec certitude ce qu'il lui avait dit, mais il avait redonné un sens à sa vie. Elle allait repartir de zéro, et vivre.

Le portail Azura émettait un léger et régulier bourdonnement. En regardant au travers, on pouvait distinguer les ruelles d'une ville animée.
- Je m’arrête ici petite, tu doit continuer seule.
- Merci... Pour tout...
-Je t'en prie, ça m'a fait plaisir de te rencontrer. Et puis, à vrai dire... Tu me rappelle quelqu'un que j'aimais beaucoup... Enfin bref. Allez, à plus petite!
Elle grimpa doucement les marches, et s'apprêta à le franchir, lorsqu'il l'interpella une dernière fois :
- Au fait, c'est quoi ton nom petite?
- A... Alna...
- D'accord. On se reverra, Alna.
Elle franchit le portail.

De l'autre côté, le charr souriait. Un sourire serein, lumineux.
- Alna...